Les Palmiers Et Les Grandes Plantes Ornamentales De Serre
Froide ;
Par M. De Pl-ydÏ, de Mons (Belgique).
Si l'on remonte, dans l'histoire de l'horticulture moderne, à quelques dizaines d'années en arrière, on remarque que la serre froide était alors presque exclusivement réservée à la floriculture.
Il était à peu pies admis sans conteste que les plantes curieuses, officinales, que toutes celles à formes bizarres ou grandioses et franchement exotiques, devaient se cultiver en serre chaude. On le croyait d'autant plus aisément que la plupart étaient originaires de contrées dont le climat est, en général, fort chaud. S'il s'en rencontrait, dans le nombre, qui fussent provenues de régions plus tempérées, on les classait suivant leurs analogies de forme et de famille, sans tenir compte des circonstances de latitude et d'altitude qui devaient faire modifier cette première appréciation.
Peu à peu, cependant, une circonstance imprévue, un hasard, une heureuse imprudence, plus rarement des notions précises de géographie botanique, dont les cultivateurs s'occupaient trop peu, faisaient sortir quelques-unes de ces plantes de l'atmosphère tor- ride où on les avait détenues, et l'on s'apercevait avec étonnement qu'elles ne s'en portaient pas plus mal; mais que de temps, avant que l'expérience, réitérée dans de bonnes conditions, entrât dans Je domaine des faits acquis! El quand la rusticité de certaines grandes plantes ornementales était enfin établie, quel usage en pouvait-on faire parmi les collections de Pélargoniers, d'Ericacées, de Camellias, etc., où le pittoresque des dispositions et des formes végétales n'était compté pour rien?
Les grandes serres chaudes elles-mêmes, qu'un peu de goût transforme si aisément en des spécimens de forêls vierges, alignaient tristement, pour la plupart, leurs hôtes splendides et faisaient aussi de la floriculture, sans souei de la confusion des geu- res et des grands effets perdus.
Comment s'est opérée la révolution? En quelles circonstances les nobles représentants des forêts équatoriales, les Palmiers, les l'andanées, les Aroïdées, lesMelastomacëes, les Musacées, lesThéo- phrastées, les Fougères arborescentes ont-ils conquis le premier rang dans les serres chaudes, relégué la floriculture dans des serres spéciales et chassé sans appel les vieilleries dénuées d'intérêt? Quand les Yucca, les Agave, les Cactées, les Conifères, ont-ils pris une large place dans les serres froides, au détriment des plantes à fleur*? C'est ce que nous n'avons pis l'intention de rechercher. Constatons seulement que, même dans les serres froides, la place est conquise; que le beau est admis dorénavant partout, sans autre condition que d'être le beau, et que les amateurs se résignent fort aisément à voir leurs serres éternellement parées de nobles et imposants feuillages,'au heu d'attendre, une fois l'an, une floraison incertaine sur des arbustes passablement laids ou insignifiants le «este du temps.
Mais les familles ou les genres que nous venons de nommer.
joints aux ressources bien connues qu'offrent les Protéacées, les Berbéridées, etc., sont-ils les seuls où la serre froide puisse trouver les éléments de ses combinaisons pittoresques? Ces végétaux princiers, les Palmiers surtout, qui caractérisent tout particulièrement la flore des régions équatoriales, sont-ils à jamais et sans exception exclus de son domaine? Pour une serre chaude il y a vingt serres froides, et combien d'amateurs s'arrêtent avec admiration devant telle merveille de la végétation des tropiques, en songeant avec un serrement de cœur qu'il ne leur sera point donné de la posséder !
Peu à peu, les idées se modifient sur cette grave question. Des découvertes encore récentes ont montré des Palmiers, tantôt sous des latitudes imprévues, côte à côte des Acacia et des Epacridées, tantôt à des hauteurs peu éloignées de la région des neiges ! Là, comme ailleurs, la nature a ménagé les transitions en jetant au loin des chaînons qui rattachent entre elles les flores les plus disparates. C'est à nous de les découvrir et de nous les approprier pour en tirer des effets inattendus.
Certaines plantes, placées par la nature aux conQns de la zone inlertropicale et exposées là à des extrêmes de froid et de chaud, ont été pourvues d'un tempérament approprié, peu sensible aux froids de l'hiver, pourvu qu'elles aient été mûries, aoûtées par une haute température d'été. D'autres, même confinées entre les tropiques, n'en sont pas moins douées d'une grande élasticité de constitution qui permet de les cultiver en hiver, presque sans chaleur artificielle. Combien d'arbres des régions chnudes de l'Inde, du Brésil etc., ont passé de la serre chaude dans nos orangeries sans autre dommage que d'y perdre, cinq mois de l'armée, tout ou partie de leurs feuilles !
Quelle est, maintenant, la part que peut revendiquer la serre froide dans l'innombrable variété des plantes ornementales, principalement des Palmiers, des Cycadées, des Fougères arborescentes, des Dracénées et, en général de ces grands végétaux dont la forme n'a point d'analogues dans nos régions septentrionales et dont le seul aspect nous rappelle la zone dquatoriale et ses forets impénétrables ?
Une-sècheénumération d'espèces n'en dirait pas assez. Le nombre
de eelies qui sont incontestablement acquises à la serre froide n'est pas considérable, mais il s'accroît d'année en année. Il reste à faire beaucoup d'importations; nombre de Palmiers très-désirables ne sont connus que des botanistes, ou tout au plus introduits en exemplaires très-rares et de haute valeur. Des découvertes nouvelles sont, d'ailleurs, plus que probables. D'autre part_, des essais nombreux sont nécessaires pour établir le plus ou moins de possibilité d'hiverner en serre froide une foule d'espèces des hautes ou moyennes régions ou de celles qui croissent aux confins de la zone intertropicale. Ces essais sont entourés d'obstacles : la rareté des sujets, d'abord, et leur valeur élevée, ensuite le peu de zèle des amateurs, qui, d'ailleurs, n'ont pas toujours les connaissances et l'esprit d'observation qu'il faudrait. Tentés au hasard, sans discernement, et poursuivis dans de mauvaises conditions, ils peuvent compromettre le progrès.
Il importe donc, d'abord, d'enregistrer les conquêtes réalisées jusqu'à ce jour, ensuite d'étudier ce que nous pouvons raisonnablement attendre ou espérer, eu égard aux notions géographiques et climatériques que nous possédons. Enfin, de ces notions, jointes à l'expérience acquise, nous aurons à déduire un système de culture rationnelle, non point purement spéculatif et conjectural, ruais confirmé déjà par de nombreux et importants succès.
Les plantes de serre froide, celles qui n'exigent de chaleur hivernale que 2 ou 'J degrés au-dessus du point de congélation, se rencontrent, au niveau des mers, presque aussitôt qu'on a franchi les tropiques, mais surtout vers le 30e degré de latitude nord et sud, et jusque vers le 40e ou au delà. Ces limites varient en raison de diverses circonstances.
La végétation de cette zone a des formes qui lui sont propres: les grands végétaux monocotyledonés , avec leur feuillage immense, qui frappent d'étonnement sous l'équateur, lui manquent à peu près complètement. Néanmoins certaines familles essentiellement équatoriales, les Palmiers notamment, y sont représentés par un petit nombre d'espèces, de plus eu plus clair-semées à mesure qu'où s'éloigne du tropique, et de taille généralement très- réduite. Ainsi, dans l'hémisphère nord, le Palmier nain d'Afrique (t'hamœrops Awniiis) se trouve spontané jusque vers le 4Q* degré et résiste sans soins sons le site exceptionnel de Nice ou d'Hyères, vers le 43*. Le Dattier (Phœnix dactylifera), plus méridional, s'étend cependant jusqu'au nord de l'Atlas, sous le 35* degré, et se cultive lant bien que mal h Nice. Un autre Chamœrops, nain comme le premier, croît dans l'Amérique nord jusqu'en Caroline, sous le 35e degré, où il brave les gelées passagères de l'hiver; c'est le Ch. Palmetto. Le Chamœrops ffystrix, plus élevé, se trouve en Géorgie, un peu plus au sud ; enfin le Sabal Adansonii, espèce acaule, à fc.uillage également palmé, est à peu près des mêmes contrées.
Les Chamcerops humilis, Palmetto et surtout Hystrix,soal de très- belles plantes, à frondes palmées, très-Qiïginales, et même les deux premières, qui atteignent, dans nos orangeries, 5 mètres et plus de hauteur, sont alors hautement ornementales. Le Sabal Adansonii ne compense pas son défaut de tige par une sollisante ampleur de feuillage. Tous s'arrangent parfaitement de la serre froide, et les deux premiers, au besoin, de l'orangerie. Le Phœnix dactylifera. est moins rustique et réclame la serre tempérée'.
Le Mexique doit renfermer, dans les forêts sans fin de ses provinces septentrionales, d'autres Palmiers demi-rustiques; mais on sait peu de chose de ces contrées quasi désertes et trop rarement explorées. Nous verrons plus loin quelles ressources nous offrent dès à présent les hauts plateaux de ses provinces intertropicales.
C'est à l'extrême Orient, en Chine et au Japon, que nous retrouvons le genre Chamœrcps, le plus septentrional de tous, aventurant une espèce de taille moyenne et d'un port excellent (Ch. Fortunei ou Ch. sinensis), jusque dans les lieux où il gèle à 10 ou 12 degrés! Celle-ci est tellement rustique qu'où l'essaie en plein air, même en Belgique. Le Ch. exceha, de la Chine et du Japon, est fort voisin du précédent, sinon tout à fait identique. Ou cite encore un Chamœropsân Népaul, non introduit ici.
Le Japon nous offre encore le genre Rhapis, peu élevé, à tiges minces, frondes digitées, port gracieux. Le Ii. flabelliformis passe en serre froide sans être bien rustique. Les Ii. Kwannoivsik et Sierolsik demeurent rares et sont peu éprouvés; mais nul doute qu'ils n'appartiennent à la serre froide.
Le sud de la Chine a donné naissance à un admirable Palmier, le Livistona sinemis, connu aussi sous le nom deLalania borbonica, et qui se retrouve, en effet, à l'île Bourbon. Ce Livistona ne le cède, ni pour la grâce de son port ni pour l'ampleur de ses feuilles en ombrelles, à presque aucun de ses congénères équatoriaux. Il passe parfaitement en serre froide, ne paraît y souffrir nullement de l'hiver, et peut être considéré comme une de nos plus précieuses conquêtes.
Cet exemple nous porte plus que jamais à penser que les contrés juxtatropicales, outre les espèces inconnues que nous réservent le sud de la Chine, le nord de l'Inde, etc., doivent en avoir produit bon nombre, même parmi celles que l'on tient dans nos serres chaudes, qui ne seraient pas plus sensibles au froid que le Latania borbonica. Nous sommes, à cet égard, encore réduits aui conjectures; mais quand on songe que, dans les plaines de l'Inde, il se forme de la glace, la nuit, à fleur du sol; que le morne phénomène ou du moins un extrême abaissement de la température se manifeste dans la région des Palmiers, au Mexique et dans toute l'Amérique intertropicale; quand on lit qu'àlaNouvelle-Hollande, sous le 27e degré sud, c'est-à-dire à la limite delà région chaude, il gèle parfois le matin à 8 ou \ 0 degrés centigrades, tandis que le jour a des chaleurs de + 23 ù ?!j; quand on se représente enfin que ces extrêmes de froid et de chaud sont plus ou moins communs aux contrées limitrophes de la zone tropicale, contrées où les Palmiers croissent encore, quoique en nombre restreint, on ne peut s'empêcher de croire que le plus grand nombre de ces beaux arbres sont bien moins frileux qu'on ne le pense et souffrent plus qu'ils ne profitent d'une continuelle réclusion en serre chaude.
Nous allons, maintenant, nous occuper de l'hémisphère sud. Les îles méridionales de l'océan Pacifique doivent, suivant toute apparence, nous réserver quelques surprises. Sur le continent d'Amérique, le Chili s'offre le premier à notre attention avec souJu- bcea gpectabilis (Cocos ou Molinœa chilensis), distingué, de très- haute taille, à frondes ailées, rustique au point de braver plusieurs degrés de gelée.
Il est à présumer que, sur d'autres points du Chili méridional,on trouverait d'autres Palmiers également peu frileux; mais les renseignements et les expériences manquent. Nous ne sommes pas mieux renseignés sur les espèces propres au Paraguay, au pîateau de Tucoman, à la province de Corrientes et à d'autres da centre tempéré de l'Amérique méridionale; nous les indiquons seulement comme des mines à exploiter. Dans les Pampas, on signale le charmant Cocos australis (Diplothemium campestre), toujours assez rare en Europe. La province brésilienne de Sainte-Catherine, située entre le î6e et le 29e degré, ne promet pas seulement des richesses; nous tenons de l'amitié de M. Linden, parmi d'autres belles espèces, objets de nos essais, un superbe Cocotier de cette province, C'ocos Homanzoffii,qm s'est comporté parfaitement en serre froide.
Le sud de l'Afrique produit beaucoup moins de Palmiers que de Cycadées, famille \oisine dont nous parlerons plus loin. Le beau Pliœnix reclinata, cependant, appartient à l'Afrique australe, et, comme on devait s'y attendre, il passe en serre froide, où il devient éminemment ornemental.
Mentionnons, en passant, \-a pointe sud de la grande île de Madagascar et ses plateaux intérieurs, riches contrées à explorer, et arrivons aux grandes îles de l'Australie anglaise, celle providence des amateurs. Rien d'étonnant que le nord de la Nouvelle-Hollande, qui se présente vers le 12e degré, renferme des Palmiers et toute une végétation analogue à celle des Moluques; mais que des familles propres aux régions équatoriales y soient représ3ntées Lien au sud du tropique par des espèces aussi nombreuses que brillantes ; que, bien plus, ces espèces ou d'autres des mêmes genres se retrouvent encore à Van Diemen et à la Nouvelle Zélande, au delà du 40e degré sud, c'est là une circonstance exceptionnellement heureuse pour l'horticulture et dont on est loin encore d'avoir tiré tout le parti désirable.
Les Palmiers introduits de l'Australie sont principalement : Livistona (Corypha) avstralis, de la Nouvelle-Hollande occidentale, grande espèce à frondes en éventail et à pétioles épineux, tout à fait de premier ordre; son introduction en serre froide ne fait plus de doute; le Livistona humilia, moins brillant,est encore très-digne d'intérêt; Kentia sapida (Areca) de la Nouvelle-Zélande,' le plus rustique de tous, supportant sous son ciel natal la neige et la gelée; acaule, du reste, élégant et ornemental par ses jolies frondes pennées; Kentia robusta (Seafort/lia), même pairie, mais dans de
larges et magnifiques proportions, tige élevée, Ires-beau et rare; Seaforthia elegam, bel arbre à haute tige, affectant, comme les deui précédentes espèces, le faciès du genre tropical Areoa; Seaforthia gracilis, non moins recommaudable et plus raie. Tous sont bien et . dûment acquis à la serre froide.
Jusqu'ici nous avons presque exclusivement énuméré les Palmiers appartenant, par la latitude de leur lieu d'origine, à la zone tempérée. Ce sont, en général, les plus robustes, ceux qui s'accommodent le plus sûrement des froidures prolongées de nos hivers ; maintenant nous avons à rappeler qu'en outre des régions lenipéréesà raison de leur latitude, il y a, enlre les tropiques, sous l'équateur même, des montagnes, de vastes plateaux, tempérés et même froids et très-froids à raison de leur altitude, c'est-à-dire de la hauteur absolue des lieux. On sait que la température moyenne décroît d'un degré centigrade pour environ 180 mètres d'élévation au-deêsus de l'Océan ; si elle est, sous l'équaleur, de 28 degrés au niveau des mers, elle sera de 27° à 4 80 mètres au-dessus, de 18* seulement à 1,800 mètres, et de i I ° et une fraction à 3,000 mètres. Or, jusqu'à 3,000 et 3,bOO mètres d'altitude, on trouve, dans toute la zone équatoriale, des Palmiers qui bravent là un climat rude, à peine tempéré le jour, d'un froid glacial la nuit; à 3,500 mètres commencent les neiges. Le nombre de ces Palmiers de la tem froide n'est pas bien grand, il est vrai; nous sommes loin, d'aih leurs, de les posséder tous ; mais nous avons en outre, au moins comme sujets d'expérience, tous ceux qui atteignent, sans la dépasser, la limite extrême de la région tempérée et qui, exposés à des variations brusques, sous un ciel déjà inclément, doivent être doués d'une constitution des moins frileuses. /
Aucune règle précise ne peut nous guider dans ces recherches. Les espèces qui préfèrent les stations les plus élevées seront probablement de serre froide ; mais à ces hauteurs où la pression atmosphérique est sensiblement diminuée, où l'air est raréfié et d'une grande pureté, où la violence des vents, la non-réverbération des rayons solaires, etc., créent un climat sans analogie possible avec celui de nos serres, il s'élève une végétation d'une constitution toute spéciale et fort difficile souvent à transporter ailleurs. Il faut donc expérimenter et le faire avec intelligence ; quelques témérités même ne seront pas de trop, et les échecs devront être soigneusement notés.
Parmi les Palmiers des hautes régions, qui se sont parfaitement comportés en serre froide, nous devons mentionner avant tout le genreBrahea,dont les frondes palmées, luisantes, onttme grâce infinie.Le Brahea dulcis, des Andes, du Pérou, etc ; le B. conduplicata, qui croit au Mexique, dansles forêts de pins;.le //. nitida des mêmes régions, etc., sont bien des.plantes de serre froide et des meilleures. Nous avons pu, grâce à M. Linden, essayer la dernière avec un plein succès. Nous avons échoué avec VEnttrpe edulis, de la région tempérée, sans que nous paissions affirmer que la mort de cette espèce soit due exclusivement au froid. On comprend que la porte d'une toute jeune plante puisse tenir à quelque imprudence et qu'un échec unique ne soit pas très-concluant.
Après les Brahea, nul Palmier ne nous paraît devoir mieux réussir en serre froide que le magnifique Cercxylonandicola, piaule éminemment robuste, qu'oïl trouve en abondance entre 2,300 et 3,500 mètres d'altitude, sous une température moyenne de 8 à 14 degrés! Il y a d'autres Ceroxylm et des genres voisins qui se prêteraient aux essais, sans la rareté des sujets. Le Chamœdm;ea glaucifolia, jolie espèce, croît dans la région des Pins, probablement vers 2,500 à 3,000 mètres; l'Oreodoxa frigida s'élève jusqu'à 2,800 mètres, où il subit des minima de température de 5 degrés. On peut encore chercher dans les genres Astrocaryum, Chamœdarea, Cocos, Eutcrpe, Geonoma, Oreodoxa, Sabal, etc.
Le versant méridional de l'Himalaya, les montagnes de la Chine méridionale, de Java, de Sumatra, de Bornéo, des Philippines, d.es Moluques, etc., ont certainement de nombreux Palmiers propres à la serre froide; mais nous en possédons très-peu, et les autres sont ou inconnus ou à peine étudiés par les botaniste*. Nous avons déjà mentionné le beau Livislona sinensis; nous voudrions voir essayer aussi le Corypha Gebanga des Moluques. On peut compter sur l'Arecahumilis, croissant à î,700 mètres dans les montagnes de Java, parmi les Chênes; mieux encore sur l'admirable Chamœ- rops Khasyani (tomentosa, Martiana), Tune des plus gracieuses plantes qui existent; celui-ci croît tout au nord de l'Inde, vers le Népaul, à 2,600 mètres d'altitude, sur un sol que la neige couvre quatre ou cinq mois de Tannée! Dans les mêmes régions qjue ce Chamœrops croissent le Phœnix humilis (acaidis), à l'altitude de plus de 2,000 mètres, Phœnix sylvestris, à 4,700 mètres, Walli- chia oblongifotia, espèce acaule, à plus de 1,300 mètres; ce n'est pas trop présumer que de les compter parmi les espèces de serre froide.
Mentionnons encore, mais seulement comme sujets d'études et d'expériences : Borassus flabellitormis, qui s'étend au sud jusqu'au 30e degré; Calamus equestris et Caryota milis,qui passent, dit-on, de rudes hivers en Provence et à Nice, et d'autres espèces des genres Areca, Corypha, Latania, Livistona, Phœnix, Seaforthia et Wallichia; on voit qu'il y a de la marge.
En résumé, 25 Palmiers au moins sont indubitablement acquis à la serre froide; une dizaine d'autres n'attendent que l'épreuve décisive. Quant au reste, le temps et des introductions nouvelles nous réservent des richesses impossibles à prévoir.
Après la grande famille des Palmiers, il nous faut citer celle des Cycadves, moins imposante de taille, mais plus originale encore et d'aussi grande valeur ornementale. Les Cycadées, malheureusement, sont de croissance très-lente; leur lige ne se forme qu'après une longue série d'années, et, pour les avoir dans toute leur majesté, il faut les recevoir du pays natal. Les petits exemplaires sont loin, d'ailleurs, d'être sans mérite; ils ont de la grâce et de l'originalité, et leur valeur s'accroit entre les mains du cultivateur intelligent.
Les genres Zamia et Çeratozamia sont à peu près les seuls de la famille qui ne franchissent pas la zone chaude ou tempérée; dans les Cycas, le circinalis et peut-être les inermis et Rumphii, se refusent à la culture de serre froide; mais le Cycas revoluta da Japon, au contraire, brave le froiJ et même la gelée, aussi bien que le Dioon edule du Mexique, autre fort belle plante, très-digne d'attention. Les Encephalartos et Stangeria du sud de l'Afrique, de forme admirable, ainsi que les Macrozamia, Çeratozamia et Cala- kidozamia d'Australie, tous alliés de près, tous très-distingués, sont très-probablement de serre froide; il est prudent, toutefois, de n'y risquer que des exemplaires de peu de valeur. Les lieux de leur origine, soumis à de fortes chaleurs estivales, ont aussi, en hiver;
des froids vifs mais passagers. Ce ne sera donc pas un abaissement momentané du thermomètre, même jusqu'à zéro, qui leur sera fatal, mais bien la continuité d'une température basse, surtout
avec humidité et sans soleil.
(la suite au prochain numéro.)
Les Palmiers Et Les Grandes Plantes Ornementales De Serre
Froide; ' :l ' ...:/.
Par M. ,de Piitdt, de Mods {[Belgique). 2e article. (Voirie Journal, l. IX, 4863, pp. 687-697).
Les Cycadées ont été considérées, en raison de leur port, mais non de leurs caractères, comme une forme de transition entre les Palmiers et les Fougères. Quoi qu'il en soit, cette dernière famille, l'une des plus considérables, est maintenant fort recherchée, mais surtout pour la serre chaude ou plutôt tempérée. Nous sommes convaincu que les Fougères exigeant impérieusement la serre chaude sont en nombre très-restreint, tandis que la quantité de celles qui se contentent d'une serre froide bien conduite est considérable. Nos renseignements, sur ce point, concordent avec notre expérience.
Nous trouvons, dans le beau mémoire de Maertens et Galeotti ; sur les Fougères du Mexique, que c'est surtout dans la région tempérée et dans la partie de la zone froide qui la suit immédiatement, depuis 3000 jusqu'à 8 à 40 mille pieds (IOOO à 2700 ou 3300 nîèt.) c'est-à-dire jusque sur des sommitésd'un climat constamment: âpre et glacial, que se rencontre l'immense majorité des Fougères mexicaines.
Il n'entre pas dans notre cadre de traiter des Fougères traçantes onjacaules; nous voulons seulement insister sur la très-grande importance des Fougères arborescentes comme plantes d'ornement de serre froide. D'après le mémoire que nous venons de citer, ces Fougères se rencontrent au Mexique entre 1200 et 2000 mètres d'altitude. Vers cette dernière limite commencent les bois de Pins et les Ericacées, c'est-à-dire la région froide, quasi alpine; le climat 7 est déjà sévère; la température moyenne n'y atteint que 45 degrés. Or, pour apprécier l'étendue des conquêtes promises à la serre froide, disons que YAlsophila pruinata (Lophosoria), qu'on range sans hésitation parmi les plantes de serre froide, occupe an Mexique une bande étroite, entre 1100 ou 1200 mètres au minimum et 1350 mètres au plus haut, c'est-à-dire dans la position la plus chaude de la zone des Fougères en arbre.
Ce n'est pas non plus vers l'Equateur que ces magnifiques plantes sont réunies en grand nombre, mais bien vers les tropiques et an- delà. Nous avons sur ce fait le témoignage de notre savant ami M. J. Linden, et en général, de ceux qui, comme lui, ont-beaucoup vu et observé avec intelligence. Les découvertes faites en Australie et surtout à la Nouvelle-Zélande ont étendu bien loin sous le ciel austral la patrie des plus brillantes Fougères arborescentes. Il ne reste aucun doute sur la parfaite rusticité (en serre froide) des admirables espèces australiennes; citons YAlsophila australis, si majestueux et d'une vigueur de végétation incroyable, lorsqu'on lui prodigue (en été du moins) l'eau et la nourriture; Y Al. excelsa, des mêmes régions, moins répandue; le Balantium antarcticum, dont on a des exemplaires à très-hautes tiges bien droites, couronnées de frondes amples et élégantes ; les Dicksonia fibrosa et squarrosa de la Nouvelle-Zélande, très-rares encore et d'une beauté hors ligne; les Cyathea, surtout C. dealbata, si recherchée et si brillante, avec ses grandes frondes à revers blancs, et C. medullaris dont le tronc et les rachis sont revêtus de paillettes noires; puis \eLomaria cycadi- folia, d'une gracieuse originalité; le Lomaria discolor, jolie espèce, enfin les Todea d'un faciès tout particulier, T. australis, T. hyme- nophylloidet à frondes translucides et des plus curieuses. Mention-
nons encore, mais pour mémoire, le gigantesque Angiopteris ausiralis, haute nouveauté de premier ordre, provenant de la Nouvelle-Zélande.
Il faut joindre à ces richesses des îles australes les espèces américaines : Alsophila ornata, de Sainte-Catherine, A. pruinata du Mexique, A. Warsceiciczii, etc., toutes magnifiques et éprouvées en serre froide; A. gigautea, d'Assam, rare et imposante; Cibotium glaucescens, des Philippines; Balaittium Cul ci ta qu'on trouve aussi à Madère; B. JCarstenianum, Sellawianum ; Cyathea Beirichiana du Bsésil austral, peutrètre le C. funebris de la Nouvelle- Calédonie, etc., etc. Les IHechnum corcovadense et riograndense, peu élevés, à feuillage pinnatifide, bien inférieurs aux précédentes espèces, ne sont cependant pas moins de belles plantes qui se mêlent bien aux autres formes, et ne craignent pas le soleil d'été, non plus qu'un froid modéré en hiver. Citons encore l'Hemitelia capensis et d'autres probablement, qui ont leur mérite, et le joli Lomaria mayellanica, à frondes pinnatifides, tout ce qu'il y a de moins frileux. Enfin mentionnons une espèce non arborescente, mais à frondes de dimensions colossales : l'Angiopteris australis, de la Nouvelle-Zélande, nouveauté de premier ordre. Nous avons échoué à peu près complètement dans un essai fait sur le Cibotium Princeps, l'une des Fougères les plus majestueuses, mais originaire de la région chaude.
Il est inutile d'insister sur l'immense valeur de ce contingent de Fougères en arbre, suffisant pour peupler les plus magnifiques serres froides et pour leur imprimer une physionomie de grandeur sauvage impossible à dépasser.
Il nous reste à parler du groupe des Dracœnces, à tiges simples, droites, garnies et couronnées régulièrement de longues feuilles gladiées, rarement pétiolées, et offrant un ensemble à la fois très-élégant et tout à fait exotique. Les premières espèces cultivées l'ont été en serre chaude, d'où quelques-unes sont sorties pour passer en serre froide où elles se comportent bien. Mais l'importance de ce groupe est surtout, pour nous, dans les espèces australiennes. La Nouvelle-Hollande et, particulièrement, la Nouvelle-Zélande, nous ont révélé d'admirables plantes dans les genres Cordyline et Dracœnopsis* Le Cordyline indivùa, la plus remarquable de toutes par la nuance nouvelle de son feuillage ligné d'orange, est malheureusement très-délicat; mais les beaux C. australis et cannœfolia sont à la fois des plantes de choix et des espèces très-robustes. Le flracœnopsis indivisa et ses variétés : lineata, Veitehii, sout du plus beau port et très- rustiques. Citons encore au même rang le Dracœna Banian et la var. erythrorachis. Le contraste de leurs feuilles entières et de leur forme compacte avec les mille découpures de nos Fougères, est d'un effet ravissant dans nos serres. Enfin n'oublions pas nne Pandanée très-remarquable, le Freycinetia Banksii qui vient de nous arriver de la Nouvelle-Zélande.
Nous ne voulons pas pousser plus loin cette revue ; ajoutons cependant qu'en joignant à ces richesses nouvelles celles de premier ordre que nous devons déjà aux genres Agave, Aralia, Banksia, ûonapariea, Beaucarnea, Dryandra, Ficus, Hechtia, la- matia, Grevillea, Mahonia, Protea, Tesludinaria, Xanthorrhaa, Yucca, aux Conifères, aux Cactées, aux grandes Aloinées, etc., nous pouvons composer d'immenses collections de culture facile, exigean t au pi us 3 degrés centi grades au-dessus de zéro en hiver, c'est- à-dire vingt nuits dechauffage, en moyenne, sous le climat de la Belgique, et capables de lutter sans nul désavantage avec tout ce que tes grandes serres chaudes peuvent réunir de raretés équatoriales.
Culture spéciale.
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Les grands végétaux que nous venons de passer en revue ne peuvent, on le conçoit, se cultiver comme les modestes Légumineuses de l'Australie ni comme les Azalea, les Pelargonium, etc. Ici, on vise à obtenir une floraison abondante ; là on a surtout besoin de développer un large feuillage, régulier, exempt de défauts, bien vert. Les grandes Mouocotylédonées ont, la plupart, une croissance rapide, au moins quand elles arrivent à l'âge adulte. Elles émettent de vigoureuses racines qui s'enfoncent profondément. Les Dracœnopsis auslraliselindivisa, par exemple, livrés à la pleine terre du jardin pendant 4 à 5 mois d'été, y acquièrentdes proportions et une ampleur de feuillage que la culture en pots voudrait en vain leur donner. On ne peut traiter de même toutes les
Dracaenées, ni les Palmiers ni les grandes Fougères ; mais c'est une indication utile. Voici ce que l'expérience nous a enseigné quant aux Palmiers, et ces notions sont applicables dans une certaine mesure aux Fougères et à bien d'autres grandes plantes : Lorsqu'ils sont lout petits, c'est-à-dire à leur première année de semis, on les tient dans des pots étroils, en terre de bruyère pure, et on continue à les laisser un peu serrés jusqu'après la seconde année. Quand leurs feuilles, jusque-là simples et dressées, commencent à se diviser et à prendre leurs caractères propres, on leur donne plus d'espace et de nourriture, et s'ils croissent vigoureusement, on peut leur donner deux dépotages, l'un au printemps et l'autre en été. Tant qu'il fait chaud, on ne ménage pas l'eau; en hiver, au contraire, on n'arrose que pour le strict besoin. Quand les plantes, complètement adultes, ont pris toute leur forme et étalent leurs frondes, il est très-souvent bon de mêler''un peu d'argile douce avec la terre de bruyère. ' ' *' ^ '' " %1 '
Les Palmiers aiment une atmosphère humide et l'ombre, mais non l'humidité excessive et stagnante, qui détermine là moisissure et vicie l'air, ni l'ombre épaisse qui, sous prétexte de rompre les rayons du soleil, supprime la lumière. Toutes lès-plantes tropi' cales, sans même en excepter les Orchidées et les Fougères, se plaisent dans une serre bien éclairée, et il importe, en ombrageant, de ne pas dépasser la limite; c'est là un point délicat. Quand les plantes s'étiolent, poussent maigrement et inclinent obstinément leurs feuilles vers la lumière, c'est un indice qu'elles veulent vivre plus à découvert. Si, au contraire, elles jaunissent, ne font que des feuilles trop courtes et rares, il faut essayer de plus d'ombre et de moiteur. Le tempérament des Fougères est fort dissemblable. Quelques-unes croissent naturellement en plein soleil, sur les rochers nus; le plus grand nombre sous l'ombre de forêts épaisses, au bord des ruisseaux ou dans des lieux humides. On ne peut que difficilement être renseigné sur ces circonstances ; mais, en général, les Fougères ont ce grand mérite qu'elles croissent eu terre d'une manière très-normale, sous l'ombre des grandes plantes, et occupent ainsi des emplacements qui, sans elles, demeureraient vides. Cette observation n'est plus exacte quant aux grandes espèces arborescentes qui devront être tenues à découvert, sous un ombrage modéré. On les conservera toujours en terre de bruyère pure, san* mélange d'autre terre.
Les Dracaenées, sauf le Cordylitu; indivita, sont robustes et faciles ; elles supportent le chaud et le froid, l'humidité et la sécheresse, sans grand dommage ; mais pour que le feuillage ait toute sa beauté, il faut les dépoter à propos, les arroser assez largement et leur éviter les coups de soleil dans la serre.
Lorsqu'on dépote les Palmiers et les Dracœna, même déjà forte) on retranche rarement les vieilles racines, à moins qu'elles ne soient mortes ou fort malades ; on le pourrait faire sans grand danger, mais au risque de retarder pour longtemps leur croissance. Au contraire, il est sans inconvénient et presque toujours avantageai, en rempotant les Fougères adultes, de couper toutes les racines enchevêtrées à l'extérieur, et même de rabattre un ou deux pouces de terre tout autour de la motte.
Nous n'insistons pas sur les autres détails de ces cultures bien connues ; ce qui doit nous arrêter davantage, c'est la conduite de la serre où elles se pratiquent.
Il est entendu que nos plantes se conservent bien l'hiver dans une serre tenue à + 3° cent, au minimum. Due bonne partie d'entre elles, toutes celles de la Nouvelle-Zélande, d'autres que non» avons signalées, se contenteraient d'être préservées de la gelée tout au plus; mais le minimum que nous indiquons a le mérite de convenir à un très-grand nouibre d'espèces, de ne point provoquai de végétation intempestive, même chez les plantes de serre froide usuelle qu'on voudrait cultiver simultanément; enfin ces trois degrés de cbaleur sont on ne peut plus faciles à conserver dans une serre bien construite.
La serre devra être bien exposée, et quand, en hiver, le soleil y élèvera la température à 15 ou 20 degrés pour quelques heures, œ sera un bien. En cela, nous nous écartons du traitement ordinaire de la serre froide. On ne prodiguera pas non plus la ventilation, et il sera sage de n'ouvrir les châssis à portée de nos plantes d'ornement que lorsque la température extérieure s'élèvera à 7 ou 8 degrés. On tiendra l'air de la serre un peu moite dans les moments de chaleur, mais sec durant le froid. S'il survenait excès d'humidité et qu'on ne put ventiler, il faudrait faire un peu de feu.
Le soin principal, celui qui distingue notre culture spéciale (les Camellia, et pas mal d'autres plantes s'en accommodent fort bien), doit être de prolonger la bonne saison, celle où la végétation demeure active, aussi longtemps que possible. On commencera de bonne heure, dès septembre et octobre, à fermer la serre la nuit et à l'ouvrir seulement quand la journée sera bonne. On la couvrira dans les nuits froides, et il serait prudent de combattre par un peu de feu les gelées précoces qui viennent parfois, en octobre, interrompre les derniers beaux jours. Ce n'est pas le froid d'une nuit ou deux qui peutnuire à nos plantes, c'est la prolongation pendant quatre et cinq mois d'un repos forcé, compliqué d'humidité et de manque de soleil. C'est pourquoi nous pensons, après expérience, qu'un excès passager de chaleur, dans les journées claires d'hiver, ne peut que les raviver.
A l'appui de ce que nous avançons, nous devons citer cette particularité fort importante que les plantes de la région chaude ou tempérée sur lesquelles nos essais ont échoué, s'étaient fort bien comportées et avaient conservé toutes les apparences de bonne santé jusqu'au commencement de janvier. Ce n'est qu'après deux mois ou deux mois et demi d'un automne froid et brumeux et d'un hiver sans soleil, que le dépérissement a commencé.
Une fois novembre venu avec les brouillards, les froids permanents et la lumière d'hiver, il faut s'y résigner franchement, admettre le repos de la végétation comme règle, ne chauffer que pour maintenir Je minimum de trois degrés, ventiler modérément, arroser peu, ne seringuer point, éviter la moisissure des feuilles et la pourriture des racines comme le danger le plus sérieux de la saison. Avec ces précautions, la végétation demeurera fraîche, et l'aspect de notre serre sera plus satisfaisant que celui de bien des serres chaudes.
Dès le milieu de février, on rentre dans la période végétative ; on ferme la serre quand le soleil luitjon aère seulement en temps un peu tiède ; puis on augmente les arrosements et on recommence à seringuer dès qu'on en voit l'utilité, mais le jour seulement et au soleil d'abord. On ombrage très-légèrement en mars, davantage ensuite pour passer l'été. S'il survient des refroidissements tardifs qui pourraient interrompre la végétation commencée, des couvertures et même un peu de feu la nuit seront opportuns.
Nous voilà arrivés à la saison où l'on retire les plantes delà serre froide ; quelques Dracœna, ceux dont le vent ne détériore pas le feuillage, pourront aller dehors, même en pleine terre, dès les premiers jours de mai. A la rigueur, toutes les plantes dont nous nous occupons y vivraient dès lors, à exposition convenable ; mais il ne suffit pas qu'elles vivent.
Les grandes Fougères en arbre ne peuvent être abandonnées au grand air en aucune saison, non à cause du froid, mais parce que les coups de vent, même modérés, brisent leurs immenses frondes et les dépouillent ainsi de leur magnifique parure. Notre atmosphère d'été est, d'ailleurs, trop sujette aux excès de chaleursèche. Il leur faut donc la serre toute l'année. , , .
Les Palmiers ont les frondes plus coriaces, mais, néanmoins, sujettes à se tordre et à se détériorer au vent. Le soleil les brûle, les pluies froides et prolongées pourrissent les racines et interrompent la végétation ; la pousse se fait irrégulièrement ; elle prend une teinte jaune et un air souffreteux. Laissés au grand air tont l'été, les Palmiers, en général, n'ont pas aoûté leurs frondes nouvelles quand vient l'hiver, et leur feuillage est étriqué, sauf celui de trois ou quatre espèces exceptionnellement rustiques (Chamœ- ropshumilis et sinensis, Jubœa spectabilis). Pour les avoir dans toute leur beauté, on doit aussi leur donner la serre toute l'année.
Quant aux Dracaenées, elles participent de ce tempérament, mais à des degrés fort différents.
En résumé, les Palmiers, les Fougères arborescentes et beaucoup d'autres grandes plantes ornementales de serre froide en hiver, sont de serre tempérée en été. Mais « qu'est-ce qu'une serre froide » que l'on tient fermée pendant l'été, si ce n'est une véritable serre » chaude ou tempérée? » Cette observation, que le savant directeur de la Flore des serres et jardins de l'Europe a publiée à propos des Gesnériacées, trouve ici une nouvelle et plus large implication. Il est indubitable qu'un nombre immense de plantes, et des plus belles, se contenteraient de la serre froide en hiver, à la condition d'obtenir, en été, assez de chaleur pour faire leur pousse et la bien aoùter, à condition de passer l'été en serre tempérée. Voilà tout le secret.
Mais, dira-t-on, vous nous promettiez des plantes deserrefroide! — En quoi donc sommes-nous infidèle à notre programme f Nous avons prétendu mettre les amateurs qui ne disposent qued'uneserre froide, et c'est l'immense majorité, en possession de toute une série de magnifiques plantes ornementales, rivales des plus belles de la serre chaude ou tempérée ; n'avons-nous pas tenu parole? Au lieu de laisser cette serre unique veuve de ses plantes et brûlant sans utilité au soleil depuis mai jusqu'en octobre, nous disons : fermez, ombragez, humidifiez, le tout suivant les besoins, et vous aurez jusqu'en octobre une serre tempérée ou chaude, dont les hôtes modérément frileux, aptes à braver les climats extrêmes, se contenteront ensuite de bien peu en hiver. Si vous voulez, suivant l'excellent conseil de M. Van Houtte, y cultiver les Ac/ùmenes, les Gloxinia et toute la charmante série des Gesnériacées ; si vousvou- lez y joindre des Begmia, des Fougères herbacées, et bien d'autres plantes, vous le pourrez sans grands soins, et à côté des splendeurs de la grande flore équatoriale, ou du moins de ses équivalents, 'vous verrez fleurir à profusion ces plantes riantes et infiniment variées qui sont encore l'ornementa peu près exclusif des serres chaudes.
' Pour finir, disons .qu'en été nos Palmiers et surtout nos Fougères aimeront de bons arrosements et force serin gages, une atmosphère d'autant plus humide qu'il fera plus chaud. La sécheresse de l'air favorise l'éclosion des Thrips, de l'Acarus rouge et d'autres ennemis funestes à nos belles plantes, capables de ravager une serre en quelques semaines, et qui ne tiennent pas dans une atmosphère chargée d'eau. Quand il fait au dehors très-chaud et très-sec, il ne faut ouvrir la serre qu'avec mesure et prodiguer l'eau en bassinages sur et sous les feuilles et sur le sol. Mieux vaut alors ventiler largement la nuit.
Certes il est plus facile d'abandonner ses plantes à l'air libre, au hasard de toutes les variations atmosphériques, sans autre souci que de les arroser, tailler, pincer pendant cinq mois d'été, et de énoncer àcelles qui ne veulent pas vivre de la sorte. Notre dessein était de montrer aux amateurs le moins bien partagés le moyen de rivaliser avec ceux qui ont tous les genres de serres à leur disposition . Qu'ils ne puissent y parvenir sans un surcroît d'embarras, cela ne fait pas question. Une serre chaude est aussi un embarras, et bien autrement sérieux en hiver. Quelles peines d'amateurs demeurent sans compensations? Ou plutôt quelle est la jouissance qui n'a pas besoin d'être achetée par un peu de peine? « Le travail n'est pas la punition de l'homme, c'est sa » récompense. »
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